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Anosmie : une vie sans odeur

L’odorat est un sens souvent sous-estimé, pourtant, il structure profondément notre rapport au monde. Il influence nos souvenirs, nos émotions et même nos interactions sociales. Mais que se passe-t-il lorsque ce sens est absent ? C’est la réalité des personnes atteintes d’anosmie, une condition qui peut être congénitale ou acquise.

Vivre sans odorat bouleverse la perception des saveurs, l’appréciation des parfums et la sécurité du quotidien. Pour ces personnes, sentir un parfum ne se résume pas à une simple expérience olfactive, mais devient un véritable défi d’interprétation à travers d’autres sens. Comment définissent-elles une odeur ? Quelles stratégies adoptent-elles pour choisir un parfum ? Et comment l’industrie de la parfumerie tente-t-elle de rendre cet univers plus accessible ?

Cet article plonge dans le monde des anosmiques et explore les solutions mises en place pour les aider à percevoir les senteurs autrement.

Comprendre le monde sans odeur de l’anosmie

Qu’est-ce que l’anosmie ?

L’anosmie est la perte totale de l’odorat. Elle peut être congénitale (présente dès la naissance) ou acquise suite à une maladie, un traumatisme crânien, une infection virale ou encore une exposition prolongée à des substances toxiques. Il existe aussi des formes d’anosmie partielle, où certaines odeurs sont encore perçues tandis que d’autres disparaissent complètement.

Selon l’association Anosmie.org , une proportion importante de la population est touchée par des troubles olfactifs à différents degrés. Pourtant, cette condition reste largement méconnue et peu médiatisée. Contrairement à la perte de la vue ou de l’ouïe, qui affecte directement notre perception et nos interactions, l’odorat agit souvent de manière discrète mais essentielle. Sa disparition peut pourtant avoir des répercussions majeures sur la vie quotidienne.

Une perte sensorielle aux multiples conséquences

Perdre l’odorat n’est pas simplement une gêne passagère, c’est une transformation profonde de la perception du monde. L’anosmie entraîne des modifications dans trois grands domaines :

L’alimentation et le goût : L’odorat joue un rôle clé dans la perception des saveurs. Sans lui, les aliments perdent une grande partie de leur complexité aromatique. Une fraise n’a plus de goût sucré-fruité, mais se résume à une sensation douce et légèrement acidulée sur la langue. Le chocolat devient une simple texture crémeuse, sans ses notes gourmandes et réconfortantes. Les anosmiques doivent s’adapter en privilégiant des plats aux textures variées et aux sensations en bouche plus marquées, comme le piquant du piment ou l’acidité d’un agrume.

Les émotions et la mémoire : L’odorat est directement connecté au système limbique, la zone du cerveau qui gère les émotions et la mémoire. Une odeur peut instantanément raviver un souvenir d’enfance ou procurer une sensation de bien-être. Privés de cette connexion olfactive, de nombreux anosmiques rapportent un sentiment d’isolement émotionnel, comme s’ils avaient perdu un lien avec leur passé sensoriel.

La sécurité et la perception de soi : L’odorat est un mécanisme d’alerte naturel. Il permet de détecter une fuite de gaz, un incendie naissant ou encore la dégradation des aliments. Les anosmiques doivent compenser cette perte en adoptant des réflexes de sécurité, comme utiliser des détecteurs de fumée et de gaz ou demander à leurs proches de vérifier la fraîcheur des aliments. Ils perdent aussi la capacité de percevoir leur propre odeur corporelle, ce qui peut être source d’inquiétude dans les interactions sociales.

Une prise de conscience tardive

L’anosmie est souvent diagnostiquée tardivement, car elle ne provoque pas de gêne immédiate dans la communication avec les autres, contrairement à la surdité ou à la cécité. De nombreuses personnes anosmiques congénitales ne réalisent leur condition qu’à l’adolescence, lorsque les expériences olfactives prennent une place plus marquée dans la vie sociale et intime.

C’est le cas de Marie-Soline, anosmique de naissance, qui n’a réellement pris conscience de son absence d’odorat qu’à l’âge de 15 ans. Comme ses amies, elle souhaitait choisir un parfum pour elle-même, mais en magasin, elle ne sentait rien. Elle ne comprenait pas ce que signifiait « un parfum boisé » ou « une note florale ». « J’avais l’impression d’être exclue d’un monde que tout le monde comprenait sauf moi », raconte-t-elle. Son entourage, n’ayant jamais remarqué ce manque, n’a pas prêté attention à son ressenti, considérant que l’odorat n’était pas un sens essentiel.

À 18 ans, elle tombe par hasard sur un reportage sur l’anosmie. Intriguée, elle consulte un ORL, qui lui prescrit une IRM. Le verdict est sans appel : elle n’a jamais eu de bulbe olfactif. « Ce fut à la fois un choc et un soulagement. J’avais enfin une explication », dit-elle.

Une condition encore mal comprise

Contrairement à la cécité ou à la surdité, l’anosmie est un handicap invisible. Il ne modifie pas l’apparence ou la communication verbale, ce qui le rend souvent incompris par l’entourage. Les anosmiques doivent souvent expliquer leur condition à leurs proches, qui ont du mal à imaginer un monde sans odeurs.

Marie-Soline explique qu’il lui arrive encore d’être confrontée à des incompréhensions : « On me tend une fleur en me disant ‘sens comme ça sent bon !’ et je dois rappeler que je ne perçois rien. Les gens oublient, parce que c’est un sens qui est automatique pour eux. »

L’anosmie est encore largement sous-diagnostiquée et peu reconnue par la société. Pourtant, elle impacte profondément la perception du monde, les relations sociales et même la santé mentale de ceux qui en souffrent.

L’anosmie : un obstacle à la perception du parfum

Le parfum est bien plus qu’une simple odeur vaporisée sur la peau : il représente une identité, une signature olfactive unique. Pour une personne anosmique, ce langage invisible est totalement absent, ce qui pose un défi dans le choix et l’appréciation d’un parfum.

Dans un monde où les senteurs sont omniprésentes – que ce soit à travers la parfumerie, la gastronomie ou même l’atmosphère des lieux – les anosmiques doivent adopter des stratégies alternatives pour s’approprier cet univers sensoriel. Si pour la plupart des gens, le choix d’un parfum repose sur une expérience sensorielle immédiate, pour les personnes anosmiques, cette sélection se base sur d’autres critères, comme l’esthétique du flacon, les émotions véhiculées par le storytelling des marques ou encore l’avis de leur entourage.

Un rituel inaccessible

Se parfumer est souvent perçu comme un geste intime et sensoriel. Il s’agit d’un rituel qui ne se limite pas à une application sur la peau, mais qui englobe une expérience complète : le plaisir de découvrir une nouvelle fragrance, l’acte de tester différentes notes, et la satisfaction de porter une senteur qui correspond à son identité. Or, pour les anosmiques, ce rituel devient abstrait.

Marie-Soline, anosmique congénitale, explique qu’elle a pris conscience de sa condition lorsqu’elle a voulu, comme ses amies, se choisir un parfum. Lorsqu’elle est allée en magasin, elle s’est rendu compte qu’elle ne sentait rien et ne comprenait pas les descriptions des vendeuses : « c’est floral », « c’est boisé »… Elle trouvait cela étrange et cette expérience lui a révélé un décalage sensoriel qu’elle n’avait jamais réalisé auparavant.

L’importance du visuel et du toucher

Privées de l’olfaction, les personnes anosmiques développent d’autres sensibilités pour appréhender les parfums. L’un des éléments essentiels est le visuel. Les flacons deviennent une première indication sur l’univers d’un parfum :

Les flacons aux formes épurées et minimalistes évoquent souvent des compositions modernes et fraîches. Ceux ornés de dorures et de motifs baroques rappellent les parfums capiteux et sophistiqués.

Les couleurs jouent aussi un rôle : un jus bleu est souvent associé à la fraîcheur et à la mer, (oops Angel de Mugler!) tandis qu’un flacon rouge suggère une fragrance intense et sensuelle.

En parallèle, le toucher prend une place prépondérante. Certains anosmiques associent la description olfactive à une sensation physique. Marie-Soline explique ainsi qu’elle préfère les matières « douces » comme la vanille. Lorsqu’on lui décrit quelque chose de doux, elle l’imagine comme un doudou, confortable et réconfortant.

Se fier aux descriptions et aux émotions

Les mots sont une autre clé pour permettre aux anosmiques de comprendre un parfum. De nombreuses maisons de parfumerie investissent aujourd’hui dans un storytelling olfactif qui ne se contente plus de lister les notes de tête, de cœur et de fond, mais cherche à raconter une véritable histoire sensorielle.

Marie-Soline partage que lorsqu’elle doit choisir un parfum, elle se base sur la description que son entourage lui en fait en utilisant des références sensorielles accessibles pour elle. Ses proches lui décrivent les senteurs à travers d’autres repères sensoriels comme la texture ou la couleur. Par exemple :

  • Un parfum poudré sera comparé à la douceur d’un tissu en velours.
  • Un parfum boisé évoquera la sensation rugueuse d’un tronc d’arbre sous la main.
  • Une note épicée pourra être décrite comme une chaleur qui picote sur la langue.

L’impact des avis extérieurs

Enfin, de nombreux anosmiques s’appuient sur leur entourage pour faire leur choix. Ils demandent à leurs proches de sentir les parfums pour eux et de leur donner un avis sincère. Marie-Soline explique qu’elle choisit ses parfums en fonction des recommandations de ses proches : « Si on me dit que ce parfum me correspond, alors je l’adopte. Je n’ai pas d’autre moyen de savoir. »

Une approche différente mais tout aussi significative

Bien que les anosmiques ne puissent pas ressentir le parfum comme la majorité des gens, leur relation aux fragrances n’en est pas moins profonde. Ils développent une manière unique et intime de choisir leurs senteurs, en s’appuyant sur les autres sens, sur leur imagination et sur la narration qui accompagne chaque fragrance.

Dans la prochaine section, nous verrons comment certaines maisons de parfumerie innovent pour rendre l’expérience olfactive accessible au-delà du seul sens de l’odorat.

Comment définit-on des odeurs et des parfums sans odorat ?

Les anosmiques développent des stratégies pour appréhender l’univers olfactif en s’appuyant sur d’autres sens. Sans pouvoir percevoir directement les senteurs, ils utilisent des analogies basées sur la texture, la vision, le langage ou même la musique.

Par la texture et les sensations

Marie-Soline se fie à l’avis de ses proches qui lui décrivent les senteurs en utilisant des comparaisons avec le toucher. Un parfum « doux » évoquera pour elle une sensation de confort similaire à celle d’un doudou en peluche. De même, elle préfère les notes vanillées, qu’elle associe instinctivement à une texture enveloppante et rassurante.

Par la vue et les couleurs

La couleur joue un rôle important dans l’imaginaire olfactif des anosmiques. Les parfums verts sont souvent perçus comme frais et naturels, tandis que les flacons dorés évoquent la chaleur et l’élégance. Marie-Soline applique cette logique pour ses choix alimentaires : elle privilégie les aliments aux couleurs vives et aux textures qu’elle apprécie, comme les tisanes aux fruits rouges, dont elle aime la teinte éclatante et la légère acidité.

Par les mots et les émotions

Les descriptions des parfumeurs aident les anosmiques à se projeter dans une expérience sensorielle. Un parfum décrit comme « une promenade en forêt après la pluie » ou « un cocon de vanille et d’ambre réconfortant » permet d’évoquer un univers qui, bien que non perceptible olfactivement, peut être ressenti à travers l’imagination.

Par la musique et les sons

Certaines maisons de parfumerie ont exploré les liens entre la musique et les senteurs. L’Orchestre Parfum, par exemple, associe chaque fragrance à une mélodie, permettant ainsi aux personnes anosmiques d’imaginer un parfum à travers le prisme de la musique. Les notes de tête deviennent alors des sons aigus et cristallins, les notes de cœur des accords chaleureux, et les notes de fond des basses profondes et envoûtantes.

Les marques de parfums et l’expérience sensorielle au-delà de l’odorat

Face au défi de l’anosmie, certaines marques proposent des approches innovantes pour rendre la parfumerie accessible au-delà du sens olfactif.

L’Orchestre Parfum : quand le parfum devient musique

Fondée par Pierre GuguenL’Orchestre Parfum propose une approche unique où chaque fragrance est associée à une composition musicale. Cette expérience multisensorielle transforme le parfum en une mélodie que l’on peut ressentir autrement qu’avec l’odorat.

Les créations de la marque intègrent des instruments et des rythmes reflétant l’âme de chaque fragrance, permettant aux personnes anosmiques de les appréhender par le biais du son. Plutôt que de simplement décrire des notes olfactives, L’Orchestre Parfum invite à écouter les senteurs, offrant une immersion sensorielle où l’olfaction devient une expérience auditive. Cette approche novatrice élargit la manière dont le parfum peut être perçu, rendant l’univers olfactif plus inclusif et accessible.

Viktor & Rolf : une expérience visuelle et narrative

Certaines marques, comme Viktor & Rolf, misent sur des flacons sculpturaux et des campagnes visuelles impactantes. À travers des designs iconiques, comme le célèbre flacon en forme de grenade de Flowerbomb ou la silhouette en nœud de Bonbon, la marque crée une identité forte qui transcende l’olfaction. Ces objets deviennent des symboles de désir et d’émotion, offrant une expérience sensorielle où le regard et le toucher remplacent l’odorat.

De plus, les campagnes publicitaires de Viktor & Rolf jouent sur une narration immersive, mettant en scène le parfum dans des univers artistiques et oniriques. Ces mises en scène permettent aux personnes anosmiques de s’approprier un parfum autrement, en l’associant à un univers sensoriel fort. Le parfum peut alors être perçu au-delà du seul sens olfactif. exemple: Spicebomb Infrared et le son qui fait monter la chaleur du corps: https://www.youtube.com/watch?v=Pg6KNZZUCPs

J’emme : une approche olfactive innovante et inclusive

La marque belge J’emme, fondée par Julie Tinant, associe ses parfums à des pierres semi-précieuses, offrant une expérience sensorielle où visuel, toucher et énergie remplacent l’olfaction. Chaque fragrance est liée à une pierre spécifique, comme Après l’Aurore et la citrine, symbolisant confiance et optimisme.

Les flacons, contenant des cristaux visibles, créent une interaction tactile et visuelle, permettant aux anosmiques de ressentir leur parfum autrement. J’emme privilégie un storytelling immersif, mettant en avant émotions et intentions plutôt que des descriptions purement olfactives. Cette approche innovante redéfinit la parfumerie en la rendant plus inclusive et accessible aux personnes privées d’odorat.

L’anosmie est bien plus qu’un simple déficit sensoriel. Elle impacte profondément la qualité de vie, la perception de soi et les interactions sociales. Grâce aux avancées scientifiques et aux innovations technologiques, l’espoir d’une prise en charge plus efficace se profile à l’horizon.

En attendant, la sensibilisation reste essentielle pour mieux comprendre cette condition et offrir des solutions adaptées aux personnes anosmiques, que ce soit dans leur quotidien ou à travers des initiatives plus inclusives dans le monde de la parfumerie et de la gastronomie.

Elfa Jouini
Bonjour, je suis Elfa ! Passionnée d'écriture et de parfum, j'allie mes deux passions, pour partager ce qu’il y a de plus beau dans le monde de la parfumerie. Très sensible aux odeurs, j'ai naturellement été amenée à accroître ma curiosité au sujet de la parfumerie. J'adore le jeu Master Parfums pour creuser ma culture générale et jouer en famille aux apprentis parfumeurs. J'adore écrire sur le parfum, et raconter ce que les odeurs réveillent en moi comme émotions !